Contrairement à une idée très répandue,
un salarié malade peut fait l'objet d'une mesure de licenciement mais, attention,
l'état de santé du salarié n'est pas, en tant que tel, un motif de rupture du contrat de travail. Il ne constitue, en principe, qu'une simple cause de suspension. La loi instaure une véritable
protection du salarié malade.Ce sont les
conséquences de l'absence du salarié malade qui peuvent justifier une mesure de licenciement, notamment lorsqu'il s'agit d'une absence prolongée ou répétée.
Comme vient de le rappeler récemment la Cour de Cassation dans un
arrêt rendu le 6 octobre 2010 (n°08-45462), encore faut-il que l'employeur justifie de certaines conditions que les juges apprécient très strictement :
L'absence du salarié doit être prolongée ou répétée, perturber le bon fonctionnement de l'entreprise, et le remplacement définitif du salarié malade doit s'avérer nécessaire.
- L'absence prolongée ou répétéeLa fréquence ou l'importance des absences est essentiellement une question de fait et il n'existe pas de «
limite type ». Il faut toutefois vérifier que la convention collective ne contienne pas de dispositions spécifiques, ce qu'elle fait souvent, notamment pour l'absence prolongée en ne permettant pas le licenciement d'un salarié tant que l'absence ne se prolonge pas pendant une durée qu'elle détermine.
L'appréciation de l'absence dépend plus précisément de la situation de l'entreprise, de sa taille, de la spécificité de l'emploi, de la qualification du salarié malade, etc. Dans le cas d'absences répétées, c'est essentiellement la remise en cause de la collaboration efficiente et régulière du salarié qui doit ressortir.
- La perturbation du bon fonctionnement de l'entreprisePour que le licenciement soit motivé,
il faut que l'absence perturbe le bon fonctionnement ou qu'elle désorganise l'entreprise. Attention, de véritables perturbations sont exigées et non pas une simple gêne.
Là encore, il est nécessaire d'apprécier cette condition au cas par cas, en prenant notamment en compte la taille de l'entreprise ou du service dans lequel travaille le salarié absent, le caractère restreint de l'équipe où il est affecté, la nature et les fonctions exercées par le salarié, le secteur d'activité de l'entreprise, etc.
Récemment, dans un arrêt du 9 juin 2010 (n°09-40203), la Cour de Cassation a rejeté l'argument de l'employeur qui, pour démontrer la perturbation, invoquait que depuis l'absence du salarié il y avait dans l'entreprise une diminution du chiffre d'affaires, de la marge et une chute des ventes. Pour la Cour, il n'était pas possible d'imputer ces faits à la seule absence du salarié.
Les juges exigent en outre que dans la lettre de notification du licenciement, il apparaisse expressément la nécessité du remplacement définitif du salarié, sinon le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 8 avril 2009, n°07-43909).
- Le remplacement définitif du salariéLa dernière condition repose sur la nécessité de procéder au remplacement définitif du salarié. Par remplacement définitif, il faut entendre
l'embauche d'un nouveau salarié sous contrat à durée indéterminée.
Une simple réorganisation des équipes en place ou de l'atelier ne suffit pas. De même, un recrutement en contrat à durée déterminée serait la preuve que l'employeur est en mesure de faire un remplacement temporaire du salarié et qu'il n'a donc pas besoin de pourvoir au remplacement définitif du salarié absent.
Pour prouver la nécessité du remplacement définitif, l'employeur peut s'appuyer notamment sur la formation spécifique qu'il est nécessaire d'avoir sur le poste, la longue expérience du salarié malade, l'autonomie requise. L'unique poste dans l'entreprise, l'activité particulière du salarié et ses responsabilités importantes peuvent aussi justifier le remplacement définitif, tout comme la pénurie de main-d'uvre et la particularité du secteur d'activité.
Il sera très logiquement difficile pour un employeur, de démontrer la nécessité du remplacement définitif d'un manutentionnaire, alors que ce sera chose plus aisée pour le remplacement d'un directeur de production.
Quoiqu'il en soit,
le remplacement définitif doit intervenir au jour du licenciement ou bien dans un délai raisonnable. Là encore le délai dépend de la nature du poste et un délai d'un peu moins de six semaines a été jugé raisonnable pour un poste de comptable.